Analyse de la jurisprudence : Cass, Civ1, 14 mars 2018 , pourvoi n°17-14.874

 

Les juges rappellent dans cet article que la prestation compensatoire peut être demandée à tout moment de la procédure de divorce et même en appel alors que rien n’avait été demandé en première instance.

 

La prestation compensatoire est une somme d’argent versée par un époux à son ancien conjoint afin de compenser la chute de son niveau de vie qui s’est créée à la suite de leur divorce. En France, celle-ci est régie par les articles 270 à 281 du Code civil.

 

La prestation compensatoire peut être demandée à tout moment, tant que le divorce n’est pas passé en force de chose jugée, ainsi une prestation compensatoire peut être demandée pour la première fois devant la Cour d’appel.

La Cour de cassation sanctionne la Cour d’appel qui prononce le divorce des époux, mais rejette une demande de prestation compensatoire au prétexte qu’elle est présentée pour la première fois devant la Cour d’appel. Tant que le divorce n’est pas définitif, une demande de prestation compensatoire peut être introduite devant le Juge aux affaires familiales.

En effet, même si la demande de prestation compensatoire n’avait pas été demandée devant le premier juge qui a prononcé le divorce, la demande de prestation compensatoire peut être demandée pour la première fois devant la Cour d’appel, puisque le divorce n’était pas passé en force de chose jugée, c’est à dire définitif.

 

« Vu l’article 270 du code civil, ensemble l’article 1076-1 du code de procédure civile ;

 

Attendu que la demande de prestation compensatoire, accessoire à la demande en divorce, peut être présentée pour la première fois en appel tant que la décision, en ce qu’elle prononce le divorce, n’a pas acquis force de chose jugée ;

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’un jugement a rejeté la demande en divorce de M. Y… ; que sur appel de celui-ci, son épouse, Mme X… a conclu à la confirmation du jugement et subsidiairement, demandé une prestation compensatoire ; que la cour d’appel a prononcé le divorce ;

 

Attendu que, pour déclarer irrecevable, comme nouvelle, la demande de prestation compensatoire, l’arrêt retient qu’une partie n’est pas recevable à présenter pour la première fois devant la cour d’appel des prétentions qui seraient le prolongement ou l’accessoire de celles formées en première instance par une autre partie et que, Mme X… n’ayant formulé aucune demande en divorce en première instance, sa demande de prestation compensatoire ne se rattache à aucune prétention originelle ;

Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Prévue aux articles 270 et suivants du Code civil, la prestation compensatoire est une indemnité destinée à compenser la différence de niveau de vie liée à la rupture du mariage.

Elle peut être versée par l’un des ex-époux à l’autre, quel que soit le cas de divorce ou la répartition des torts.

Plus précisément, la prestation compensatoire a pour but de rééquilibrer la situation matérielle des ex-époux après le prononcé du divorce et pour tenir compte en particulier de la disparité qui se produit lorsque :

– l’un d’entre eux n’a pas de revenus personnels,

– lorsque son âge ou sont état de santé ne lui permet pas de prendre ou de reprendre un emploi,

– lorsque pendant la vie du ménage il a participé par son travail à l’activité de son conjoint sans être rémunéré,

– lorsqu’il s’est consacré à l’éducation des enfants communs, et qu’il va continuer à assurer leur éducation.

La demande de prestation compensatoire est une prétention accessoire de la demande de divorce, elle peut être présentée pour la première fois en appel tant que la décision, qui prononce le divorce, n’a pas acquis la force de chose jugée. Elle a un caractère forfaitaire et prend la forme d’un versement en capital ou, à titre exceptionnel, d’une rente viagère.

Le versement peut également être mixte. La détermination de la prestation compensatoire constitue un exercice délicat. La loi énumère les critères qui doivent être pris en compte. En effet ils sont prévus à l’article 271 du Code civil qui dispose :

« La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

A cet effet, le juge prend en considération notamment :

– la durée du mariage ;

– l’âge et l’état de santé des époux ;

– leur qualification et leur situation professionnelles ;

– les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;

– le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;

– leurs droits existants et prévisibles ;

– leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu’il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l’époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa. »