Cass. Civ. 1 31 mars 2016 N°14-24.556
Deux personnes ont contracté mariage le 14 juillet 1990 et ont opté pour le régime de la participation aux acquêts. Cependant, leur divorce a été prononcé le 13 octobre 2006. C’est alors que des difficultés sont apparues lors de la liquidation et du partage de leur patrimoine.
Le régime de la participation aux acquêts signifie que durant le mariage, les époux sont soumis au régime de la séparation des biens mais en cas de divorce, le patrimoine entier doit être divisé en parts égales.
Ainsi, lors du partage des biens, les juges de la Cour d’appel ont considéré que l’acquisition par l’épouse de la portion d’un bien dont elle est propriétaire indivis ne représentait pas un acquêt mais un bien propre qui doit être porté à son patrimoine originaire.
Cela signifie que pour les juges de la Cour d’appel l’épouse ne devait pas partager ce bien avec son ex-mari dans la mesure où il s’agissait d’un bien dont elle était propriétaire avant le mariage.
Mais, la Cour de cassation n’est pas de cet avis. En effet, elle considère que le bien indivis dont l’épouse a acquis les parts, pendant le mariage, ne pouvait représenter un bien propre ou un bien acquis par succession ou par donation à titre gratuit.
Par conséquent, la Cour de cassation rappelle la définition du bien propre. Elle le définit à l’aide des articles 1570 et 1578 du code civil comme un bien qui appartient à un époux avant le jour du mariage et ceux acquis par succession ou libéralité. Elle rappelle que tous les biens acquis dans le régime de la communauté sont des biens propres par nature.
La Cour de cassation ajoute également le partage doit porter sur le patrimoine final qui est lui composé de tous les biens dont l’époux est propriétaire au moment de la liquidation du régime matrimoniale. Ainsi, il ne faut pas simplement ajouter au patrimoine finale la part du bien acquise par l’épouse mais le bien dans son intégralité.
L’épouse ayant acquis les parts litigieuses pendant le mariage, et en raison de la particularité du régime matrimonial choisi par les époux, elle est obligée de partager le bien.
« Attendu, selon l’arrêt attaqué, que le divorce de M. X… et de Mme Y…, mariés le 14 juillet 1990 sous le régime de la participation aux acquêts, ayant été prononcé par un jugement du 13 octobre 2006, des difficultés sont nées pour la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux ;
Sur les premier, quatrième, cinquième, sixième et septième moyens du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés :
Attendu que les griefs de ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal :
Vu les articles 1570 et 1578 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que le patrimoine originaire comprend les biens qui appartenaient à l’époux au jour du mariage et ceux acquis depuis par succession ou libéralité, ainsi que tous les biens qui, dans le régime de la communauté légale, forment des propres par nature sans donner lieu à récompense ;
Attendu que, pour fixer à l’actif du patrimoine originaire de Mme Y… une somme représentant la valeur, au jour de son aliénation, de la totalité du bien dont celle-ci avait recueilli, pendant le mariage, le quart indivis de la succession de son père avant d’en acquérir les trois quarts restants, l’arrêt retient qu’il résulte de l’article 1408 du code civil que l’acquisition faite de la portion d’un bien dont un des époux était propriétaire indivis ne constitue pas un acquêt, de sorte que cette acquisition ne peut engendrer aucune créance de participation au profit de l’autre époux et que, dès lors, c’est la valeur de l’intégralité des droits indivis dont l’époux est titulaire sur le bien qui doit être portée à son patrimoine originaire ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les trois quarts indivis dont Mme Y… avait fait l’acquisition pendant le mariage ne constituaient pas des biens propres par nature et n’avaient pas été obtenus par succession ou libéralité, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles 1572 et 1574 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X… tendant à voir fixer la valeur des droits recueillis par Mme Y… dans la succession de son père à l’actif du patrimoine final à 180 000 euros, l’arrêt retient qu’il résulte de l’article 1408 du code civil que l’acquisition faite de la portion d’un bien dont un des époux était propriétaire indivis ne constitue pas un acquêt de sorte que cette acquisition ne peut engendrer aucune créance de participation au profit de l’autre époux et que, dès lors, c’est la valeur de l’intégralité des droits indivis dont l’époux est titulaire sur le bien qui doit être portée à son patrimoine originaire et non pas à son patrimoine final comme le demande M. X… ;
Qu’en statuant ainsi, alors que font partie du patrimoine final tous les biens qui appartiennent à l’époux au jour où le régime matrimonial est dissout, estimés d’après leur état à l’époque de la dissolution du régime matrimonial et d’après leur valeur au jour de la liquidation de celui-ci, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le huitième moyen du pourvoi principal :
Vu l’article 4 du code civil ;
Attendu que l’arrêt dit qu’il appartiendra au notaire, au vu des dispositions du contrat de mariage, de procéder, le cas échéant, à la revalorisation de ces créances qui seront portées à l’actif du patrimoine final de Mme Y… et au passif de celui de M. X… ;
Qu’en se dessaisissant et en déléguant ses pouvoirs au notaire liquidateur, alors qu’il lui incombait de trancher elle-même la contestation dont elle était saisie, la cour d’appel a méconnu son office et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du troisième moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il confirme le jugement disant que serait portée au patrimoine originaire de Mme Y… la somme de 180 000 euros correspondant au prix de vente de l’immeuble du R. en 2010, rejette la demande de M. X… tendant à voir fixer cette même somme au patrimoine final de Mme Y… et dit qu’il appartiendra au notaire, au vu des dispositions du contrat de mariage, de procéder le cas échéant à la revalorisation de ces créances qui seront portées à l’actif du patrimoine final de Mme Y… et au passif de celui de M. X…, l’arrêt rendu le 27 mai 2014, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers ».