Par un arrêt du 12 juillet 2017, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rendu une décision en matière de divorce.

Cette affaire opposait deux époux en instance de divorce. Suite à l’ordonnance de non-conciliation, l’épouse a saisi le juge de proximité, soit depuis le 1er juillet 2017 le juge d’instance, pour obtenir le paiement de 533 euros. Cette somme correspond à la prime de l’emploi que son mari a perçue après la séparation.

Cependant, la Cour d’appel de Montpellier a rendu un arrêt du 12 novembre 2015 dans lequel elle considère que les époux peuvent réclamer leurs créances en dehors de la procédure de divorce. Cela signifie que le juge incite les époux à faire plusieurs procédures. La Cour de cassation n’est pas de cet avis et a jugé que seul je juge aux affaires familiales à tout moment jusqu’au prononcé définitif du divorce. Cette compétence exclusive du juge aux affaires familiales découle de la loi du 12 mai 2009 relative à la liquidation et au partage des intérêts patrimoniaux des époux, des concubins et des partenaires pacsés.

 

Cour de cassation Civ. 1ère 12 juillet 2017 pourvoi n° 16-20482

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : 

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Vu l’article L. 231-3, 1°, du code de l’organisation judiciaire ;

Attendu, selon ce texte, que le juge aux affaires familiales connaît de l’homologation judiciaire du changement de régime matrimonial, des demandes relatives au fonctionnement des régimes matrimoniaux et des indivisions entre personnes liées par un pacte civil de solidarité ou entre concubins, de la séparation de biens judiciaire, sous réserve des compétences du président du tribunal de grande instance et du juge des tutelles des majeurs ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, statuant sur contredit, qu’une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 21 janvier 2013 entre M. X… et Mme Y… ; que le 17 janvier 2014, cette dernière a assigné son mari en paiement de la somme de 533 euros au titre d’une prime à l’emploi indûment perçue après leur séparation, et en dommages-intérêts ; que M. X… a soulevé l’incompétence du juge d’instance au profit du juge aux affaires familiales ;

Attendu que pour rejeter l’exception de procédure, l’arrêt retient que les époux peuvent, jusqu’au prononcé du divorce par une décision définitive, faire valoir leurs créances l’un à l’encontre de l’autre lors d’une instance autonome devant le juge compétent ; 

Qu’en statuant ainsi, alors que le juge aux affaires familiales était seul compétent pour connaître de la demande de Mme Y…, qui relevait du fonctionnement du régime matrimonial des époux, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 novembre 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse ;

Condamne Mme Y… aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-sept. 

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

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Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X….

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement du 19 janvier 2015 rejetant l’exception d’incompétence soulevée par M. X… et d’avoir dit que le dossier de l’affaire accompagné de la présente décision sera transmis par les soins du greffe au juge de proximité de Montpellier ;

AUX MOTIFS QUE conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1ère du 22//05/2007 – 05-12.017), les époux peuvent jusqu’au prononcé du divorce par une décision définitive, faire valoir leurs créances l’un à l’encontre de l’autre dans le cadre d’une instance autonome devant le juge compétent ; qu’en l’espèce, il ressort des dernières écritures des parties que si le jugement de divorce a été rendu le 4 novembre 2014, il a été frappé d’appel et il n’existe aucun autre élément indiquant qu’une décision définitive serait entre-temps intervenue ; qu’en vertu de la règle jurisprudentielle ci-dessus rappelée, il convient de confirmer le jugement déféré qui a rejeté l’exception de nullité ;

ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés du jugement qu’au visa de l’article 3 du code civil, les dispositions du régime primaire qui relèvent de la loi française des effets du mariage s’appliquent aux époux étrangers qui ont établi leur domicile en France ; que le régime primaire est régi par les dispositions des articles 216 à 226 du code civil et l’article 223 prévoit que chaque époux peut librement percevoir ses gains et salaires et en disposer après s’être acquitté des charges du mariage ; que la prime de retour à l’emploi s’apparente davantage à un gain personnel ; qu’il n’est pas établi que la restitution à son bénéficiaire de cette prime serait à intégrer dans les opérations de liquidation et du partage des biens des époux ; qu’il en résulte que l’exception d’incompétence n’est pas fondée et que la demande de Mme X… née Y… inférieure en quantum à la somme de 4000 euros relève de la compétence du juge de proximité ;

1°- ALORS QUE la liquidation à laquelle il est procédé en cas de divorce englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties et il appartient à l’époux qui se prétend créancier de l’autre de faire valoir sa créance selon les règles applicables à la liquidation de leur régime matrimonial lors de l’établissement des comptes s’y rapportant ; qu’en déclarant recevable l’action engagée par Mme Y… à l’encontre de son époux alors qu’ils étaient en instance de divorce, en vue d’obtenir le recouvrement d’une créance dans le cadre d’une instance distincte des opérations de liquidation de leurs droits respectifs à la suite du prononcé du divorce, la Cour d’appel a violé l’article 267 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;

2°- ALORS QUE le juge aux affaires familiales connait des demandes relatives au fonctionnement des régimes matrimoniaux et de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux ; qu’il connait ainsi de toutes les actions patrimoniales quel que soit leur fondement juridique ; que dès lors en l’espèce, le juge aux affaires familiales était seul compétent pour statuer sur la nature de la prime de retour à l’emploi au regard du régime matrimonial des époux et sur la demande en restitution de cette prime formée par l’épouse, peu important que le divorce ne soit pas définitif ; qu’en retenant la compétence du juge de proximité, la Cour d’appel a violé les articles L 213-3 et L 231-3 du code de l’organisation judiciaire ;

3°- ALORS de surcroît QU’en statuant comme elle l’a fait, sans répondre aux conclusions de M. X… qui se prévalait de la compétence exclusive du juge aux affaires familiales pour statuer avant le divorce, sur la demande en paiement d’une créance entre époux, la Cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.