codes de procédure civileQu’est-ce que la prestation compensatoire ?

Soulignons d’abord que la prestation compensatoire ne concerne que le divorce et que les conséquences pécuniaires de la rupture du concubinage ou du PACS obéissent à des règles différentes que votre avocat pourra évoquer avec vous.

Avant 1975, l’un des époux pouvait être tenu de verser une pension alimentaire à son ex-conjoint. Généralement cette pension était due pendant la vie entière de l’ex-conjoint. Aujourd’hui les termes « pension alimentaire » sont réservées aux sommes dues à l’éducation des enfants.

En lieu et place de la pension alimentaire due à l’ex-conjoint on parle maintenant de « prestation compensatoire » et non de pension compensatoire ou d’indemnité compensatoire de divorce, comme on peut l’entendre parfois.

Contrairement à la pension alimentaire qui était viagère, c’est-à-dire due la vie entière, la prestation compensatoire est généralement versée en une fois, ou étalée sur huit ans. Cette somme est (sauf événements exceptionnels) forfaitaire et définitive.

Selon l’article 270 du Code civil : « l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d’un capital dont le montant est fixé par le juge »

Mais l’article 275 du même code permet de payer le capital sur 8 années sous forme de versement périodique voire plus en cas de circonstances exceptionnelles.

En application de l’article 276 du Code civil , le juge peut, à titre exceptionnel, prévoir le versement de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère, c’est-à-dire jusqu’au décès du bénéficiaire.

On verra plus loin les incidences fiscales et sociales sur l’étalement du paiement.

Le caractère forfaitaire et définitif nécessite que les arguments présentés au juge soient motivés avec précision et compétence.

Aujourd’hui, dès lors qu’il y a une disparité économique, une prestation compensatoire est due, même si le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui demande la prestation compensatoire, sauf circonstances particulières, et laissée à la libre appréciation du juge.

Qui fixe le montant de la prestation compensatoire ?

Le montant de la prestation compensatoire, que certains appellent aussi indemnité compensatoire du divorce ou encore prestation compensatoire du divorce est fixé par le juge.

Le Code civil ne fixe pas de règle pour déterminer le montant des prestations compensatoires. On verra plus loin comment le juge en fixe généralement le montant, mais il conserve une large marge d’appréciation. Il juge en équité et non en droit, d’où l’importance de lui présenter un dossier complet et bien motivé.

Lorsque le divorce est prononcé par consentement mutuel ce sont les conjoints qui DOIVENT convenir du montant de la prestation compensatoire dans leur convention de divorce.Ils sont assistés de leurs conseils pour déterminer ce montant. Le juge peut toutefois refuser d’homologuer la convention.

«Il (le juge) peut refuser l’homologation et ne pas prononcer le divorce s’il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l’un des époux ». Art. 232 du Code civil al. 2

Pour les autres cas de divorce, les époux PEUVENT désormais soumettre au juge la fixation du montant de la prestation compensatoire, mais ce n’est pas une obligation (dans le cas de divorce pour faute, les époux sont rarement disposés à s’accorder sur une telle convention). Ce sont donc dans les conclusions déposées par les avocats que les demandes des parties seront exposées. C’est au juge de trancher.
Ainsi l’avocat peut agir de deux façons. Si les parties rédigent une convention , l’avocat doit négocier pied à pied avec l’avocat du conjoint, soit développer une argumentation solide et justifiée dans les conclusions devant le juge.

Comment déterminer le montant de la prestation compensatoire ?

Revenons au code civil :

La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible – Article 271 du code civil

Au préalable et avant de se prononcer sur le montant :

  • Le juge doit constater qu’une disparité existera entre les conditions de vie respectives avant et après le divorce, mais aussi entre le niveau de vie de chacun des ex-conjoints après le divorce. Il n’est pas nécessaire que la disparité soit importante
  • Le juge tiendra aussi compte de l’ensemble du patrimoine de chacun des époux
  • Le juge doit aussi constater les besoins de l’époux à qui est versée la prestation et les ressources de l’autre conjoint

Les conclusions déposées par l’avocat devront donc soigneusement justifier de ces 2 points.

Pour la détermination du montant de la prestation compensatoire l’article 271 du Code civil énonce 7 critères :

  1. la durée du mariage. Il est admis que par durée du mariage il soit tenu compte de la période de vie commune précédant le mariage.
  2. l’âge et l’état de santé des époux ;
  3. leur qualification et leur situation professionnelles ;
  4. les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne. Si le conjoint a travaillé bénévolement, il peut être tentant de demander une prestation compensatoire qui tienne compte du travail non rémunéré, mais il est vivement conseillé d’exercer cette action en justice après le prononcé du divorce.
  5. le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
  6. leurs droits existants et prévisibles. Mais il ne doit pas être tenu compte des prestations et pensions reçues pour l’entretien des enfants.
  7. leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu’il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l’époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa.

Tous ces éléments sont cumulatifs. Chaque élément doit être discuté longuement avec son avocat qui connaît les habitudes du tribunal c’est à dire la jurisprudence de la prestation compensatoire.

Avant le premier rendez-vous, il peut être utile de noter tous les éléments qui permettent de déterminer quels sont les arguments à développer soit dans les négociations avec l’avocat du conjoint, soit dans les conclusions déposées devant le juge.

Il existe plusieurs méthodes de consolidation des éléments ci-dessus (trop techniques pour être rapportées ici) qui pourront être appliquées par votre avocat qui pourra envisager avec vous laquelle sera utilisée.

Mais pour la détermination du montant il faut aussi tenir compte du mode de versement de la prestation compensatoire.

Prestation compensatoire : fiscalité et impôts

Examinons l’incidence fiscale et sociale entre le versement d’un capital et une rente échelonnée sur huit ans.

Si le capital est versé en une seule fois, ou sur moins de 12 mois, le capital n’est pas imposable pour le créancier. Le débiteur, lui, bénéficie d’un crédit d’impôt égal à 25 % du capital versé, dans la limite de 30 500€ c’est-à-dire pour la fraction de prestation compensatoire inférieure à 122 000€.

Il peut arriver que la situation patrimoniale du conjoint ne permette pas de verser un capital.

La prestation compensatoire peut alors être versée sous forme de rente pendant une période de 8 ans.

Dans ce cas, les sommes versées sont déductibles du revenu global du débiteur et imposables entre les mains du créancier. Votre avocat vous permettra de calculer l’incidence fiscale de ces règles et les éventuelles conséquences pour une personne non imposable de le devenir (taxe d’habitation, redevance télévision, APL,…)

La revalorisation de la prestation compensatoire

La prestation compensatoire peut-elle être révisée après le divorce ?

En principe le montant prestation compensatoire est définitif. Les conjoints doivent donc être très attentifs à la détermination de son montant et ne pas céder à la hâte d’en finir au plus tôt.

Toutefois, par application du second alinéa de l’article 276-3 du Code civil , seul l’ex-conjoint qui doit verser la rente peut demander la révision. Il devra justifier d’éléments nouveaux qui n’existaient pas au moment de fixation par le juge.
L’article 276-3 du Code civil dispose :

« La prestation compensatoire fixée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l’une ou l’autre des parties.

La révision ne peut avoir pour effet de porter la rente à un montant supérieur à celui fixé initialement par le juge. »

Il faut noter qu’en cas de fraude de l’un des conjoints (le fait de cacher des éléments qui auraient une influence significative sur la détermination de la prestation) un recours en révision est possible. Ce recours en révision est ouvert à chaque ex époux.

Le calcul de la prestation compensatoire en cas de divorce pour faute est-il plus élevé ?

En principe le divorce pour faute n’a pas d’incidence sur le montant de la prestation compensatoire.

Ainsi la faute de l’un des conjoints n’est plus une cause de non-versement d’une prestation compensatoire. De même la faute de l’autre conjoint, n’est pas de nature à augmenter le montant de la prestation compensatoire.

Mais comme cela a été rappelé ci-dessus, le juge statue en équité et l’avocat peut souligner la faute du conjoint pour « améliorer » le montant de la prestation compensatoire.

Le rôle de l’avocat dans la fixation du montant de la prestation compensatoire

L’avocat doit négocier pied à pied avec l’avocat du conjoint, soit développer une argumentation solide et justifiée dans les conclusions devant le juge.

Si c’est le juge qui fixe le montant de la prestation compensatoire, l’avocat devra justifier de la disparité entre les époux et du besoin de l’époux demandeur.

L’avocat aidera le demandeur à motiver chacun des 7 critères qui sert à fixer le montant de la prestation.

Il vous exposera les différentes méthodes de consolidation et vous choisirez ensemble la plus pertinente.

Il examinera avec le demandeur les conséquences fiscales et sociales de l’alternative rente/versement en capital.

Enfin, compte tenu du caractère définitif du montant de la prestation, il aidera le demandeur à prendre patience et à ne pas céder à la hâte d’en finir au plus tôt.